NÎMES premier terrain de combat contre le Statut Quo.

Je me dois de vous aviser que je n’étais pas à Nîmes pour voir les Miuras et Castaño.  Je me fie donc à des plumes concordantes, en l’occurrence celle du Matador de Toros Frédéric Pascal (Terres Taurines) et celle de German Jimenez de Burladero.com.  Ce qui m’intéresse dans leur narration du spectacle est le rapprochement de celle-ci avec des opinions partagées dans Toreoyarte précédemment dans l’article SEVILLE – De ARROJADO (Nunez del Cuvillo) à VILANERO (Moises Fraile).

Dans cet article j’envisageais différentes orientations possibles de la tauromachie pour l’avenir.  Une étape a été franchie le 26 mai 2012 à Nîmes.  L’inspiration de Javier CASTAÑO a été de rompre les codes et à lidier et de toréer des toros d’une ganaderia réputée difficile à un niveau correspondant à leurs caractéristiques et non à leur réputation.  Il a ainsi montré qu’on peut lidier et toréer autrement que par les sempiternelles chorégraphies mécaniques des figuras et de leurs clones, et toutefois triompher a lo grande.  C’est possible lorsqu’on rencontre un adversaire dont les qualités appelles à cette nouveauté.  En effet, ce qu’a réalisé CASTAÑO à Nîmes est pratiquement impossible avec les toros toréés par le G10 qui n’ont pas le fond nécessaire pour permettre un tel spectacle.
Que s’est il passé à Nîmes ?  D’abord un torero de second plan a été annoncé en solitaire avec une corrida réputée difficile de Miura.  En cela rien de très exceptionnel, l’histoire de la tauromachie est remplie de ce genre de geste.  Alors quoi de nouveau ?  D’abord l’empresa organisatrice, Simon Casas, fait actuellement partie de celle de MADRID.  Son expérience aura un écho particulier en plein milieu d’une féria de San Isidro en manque de résultats.  Comme l’a bien expliqué Frédéric Pascal si cette corrida avait eu lieu à Madrid l’évènement serait sans conteste révolutionnaire, comme la qualifie German Jimenez dans sa chronique, et CASTAÑO serait en passe de devenir Figura.  Nous verrons si Simon Casas a une influence suffisante pour faire programmer de tels évènements dans la Cathédrale qui, elle, n’a pas programmé de corrida de MIURA cette année.  Les forces du Statu Quo seront probablement à l’œuvre pour empêcher tout acte révolutionnaire.  La bataille est probablement déjà engagée.  A Madrid les forces en présence ont opté pour réduire le trapio des toros avec, probablement, le secret espoir de voir ces toros durer et s’employer.  Pour l’instant c’est un fiasco retentissant car avec poids ou sans poids, trapio ou sans trapio, un toro sans caste ne combattra pas.  Et s’il en as et qu’on ne cesse de l’importuner, avant le combat, par le manejo devenu chose courante, on affecte irrémédiablement sa capacité d’expression le jour J.

Ensuite, à NIMES, les aficionados ont vu CASTAÑO toréer en s’inspirant de gestuelles rentrées dans l’imaginaire de l’aficion dans d’autres circonstances, comme par exemple le fait de toréer comme Morante assis sur une chaise, ou de tuer al recibir en citant d’une grande distance comme l’avait fait déjà Luis Francisco Espla.  Mais en l’occurrence CASTAÑO l’a fait avec des MIURAS qui même nobles, n’en présentent pas moins la difficulté liée à leur volume corporel et à l’inertie qui en résulte.  Il s’agit à la fois d’un message et d’un challenge.  Le message adressé à l’aficion et le challenge aux compañeros est celui d’intimer que la decisión et el valor d’un torero peuvent faire des miracles avec les qualités d’un ganado plus sauvage, plus fort, plus durable.  Et l’émotion qui en résulte est d’autant plus grande.  La question que nous sommes en droit de nous poser est de savoir si les membres du G10 auraient été aussi efficaces que lui et la seule réponse rationnelle est de préciser que nous ne le sauront que lorsqu’ils accepteront de se présenter dans de telles circonstances.  Ce qui est évident c’est que les aficionados qui étaient à Nîmes ont vécu une expérience nouvelle, peut être un tournant majeur dans l’évolution de la tauromachie, un qui peut faire exploser le Statu Quo.  Les regards vont se tourner, dans les jours à venir, vers les corridas de VIC et de Madrid ainsi que Bilbao le 16 juin.  Si dans le marasme actuel, les corridas dures sont créatrices de nouvelles émotions, s’il y a des répliques à l’évènement de Nîmes,  la temporada 2013 pourrait être surprenante.  Les titres de presse nous rabâchent actuellement, en des termes pléthoriques, les succès d’El JULI dans les plazas du circuit B et C, devant des adversaires issus des ganaderias de medio toro.  Nous sommes tous en mesure de visualiser ce que ces faenas ont été, nous les connaissons.  Par contre, pour celles de CASTAÑO à Nîmes, les absents doivent faire appel à leur imaginaire,  car ça on ne l’avait pas encore vu.

Celui du G10 qui se sent mal traité ou sous estimé peut dès demain s’annoncer dans un cartel aussi inattendu que celui de Nîmes et montrer qu’il est capable, lui aussi, d’inventer une nouvelle tauromachie.  Car de ce point de vue, et l’aficion doit être lucide, si les encastes  délaissés reviennent à la mode et s’ils sont toréés avec succès par ceux qui ne les combattent pas habituellement, ce sera en le faisant dans un style nouveau.  L’aficion doit aussi accepter le risque d’échec, le même d’ailleurs que celui des corridas de medio toro,  car toutes les corridas ne peuvent être de triomphe si la sauvagerie revient dans les arènes.  Il faudra s’enthousiasmer pour de nouvelles gestuelles et de nouveaux déroulements de corridas.  Mais n’allez pas le dire à ceux qui étaient à Nîmes.  Ils n’ont eu aucune difficulté à ressentir ces grandes émotions qui résultent de la présence du toro bravo et d’un torero qui sait, veut et peut.

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