Réflexions sur le phénomène Andrés Roca Rey.

Andrés Roca Rey est incontestablement le moteur actuel de la taquilla mondiale et cela de manière totalement justifiée compte tenu des succès qui l’auréolent.  Ces succès, ils se les forgent avec une technique puissante de domination et un courage sans retenue.  Sa technique est claire et moderne.  Comme beaucoup de ses prédécesseurs figuras, il opte pour un positionnement al hilo et torée en ligne.  Au contraire des précité,s il n’utilise pas cette technique à des fins de protection, en optimisant  l’exposition physique.  Bien au contraire,  malgré son choix technique, il laisse les cornes passer au plus près de son corps et donne ainsi à son toreo une intensité qui explique la ferveur populaire à son égard.  Au moment de la mise à mort il n’utilise aucun subterfuge d’évitement.  Avec un certain classicisme, il avance la muleta sous le museau pour faire « humilier » l’adversaire, puis entre en rectitude.  Parmis les figuras, ses choix techniques sont louables et marquent la différence.

Son statut de vedette lui permet de sélectionner élevages et compagnons de cartel.  Lorsqu’il combat avec d’autres figuras et devant les toros habituellement choisis par eux,  il trône et triomphe.  Notons aussi que lorsqu’il croise le chemin de toreros au toreo plus pur, comme Paco Ureña à Madrid ou Pablo Aguado à Séville, même un bon et volontaire Roca Rey passe au second plan.  Ce fût particulièrement le cas à Séville.  Andrés Roca Rey représente la régularité et les autres sus-nommés la poésie.  Roca Rey regarde probablement leurs faenas avec questionnement et envie car, compte tenu de ses choix techniques, il ne semble pas être en mesure de distiller cette tauromachie là.  Est-ce bien grave ? Non, car la réciproque est vraie aussi.  Personne, actuellement, n’est capable de triompher face à autant de toros que Roca Rey.  Pour ce dernier, tout toro un tant soit peu mobile, et sans scories rédhibitoires, sert au triomphe.

Une exception à la règle est celle d’ Adolfo Martin à Madrid en comparaison aux ganaderias choisies qui lui ont valu sa seule grande porte de la San Isidro 2019.  Il a obtenu son succèsà Madrid en toréant cet exemplaire de la même manière qu’il torée tous les autres toros face auxquels il triomphe.  Notons que cette Puerta Grande lui est venue par le Bombo avec une corrida non commerciale.  Les choix commerciaux ont été, cette fois,  moins productifs durant la feria madrilène.

À n’en pas douter Andrés Roca Rey va poursuivre son chemin glorieux.  Les risques qu’il encourt, hors ceux affrontés par tous les toreros qui se mettent face aux toros, sont ceux de la lassitude du public tant sa technique est répétitive et son expression artistique simple.  Un autre risque sera celui vécu par d’autres illustres prédécesseurs, à savoir celui de l’évolution de sa  technique vers un toreo défensif.

Pour l’instant Roca Rey a mis en échec les figuras qui se partageaient le trône avant lui. Y aura t-il révolte des anciens, challenge des nouveaux ?  En partie grâce à lui, nous vivons une époque taurine des plus intéressantes à l’image de cette San Isidro 2019 qui restera dans les annales comme l’une des meilleures et dont ne manquera pas de se prévaloir Simon Casas.  Il ne faut pas cependant attendre de Roca Rey qu’il nous émeuve avec le toreo qui touche l’âme comme l’ont fait Pablo Aguado, Paco Ureña ou encore  Antonio Ferrera durant cette San Isidro 2019. Cette facette là de sa tauromachie Roca Rey ne l’a pas encore développée.  Sa carrière est naissante et il aura le loisir d’éviter les écueils et de s’inventer une tauromachie de poésie pour l’âme.

René Philippe Arneodau

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