Valdemorillo (Madrid) – 5 février 2022 – 2ème de feria – Nouvelle geste de Morante de la Puebla . Une oreille pour Diego Urdiales et grande faena de Daniel Luque sans trophée.

Avec une corrida à guichets fermés, Valdemorillo lançait une temporada qui sera marquée par le sceau de Morante de la Puebla, dont on dit qu’il aurait déjà signé plus de soixante-dix contrats !! Le tout Madrid taurin était au rendez-vous pour une affiche très attractive car Morante, Diego Urdiales et Daniel Luque arrivaient forts de leur réputation et en mesure d’assurer le renouveau de la tauromachie, classique et naturelle, déjà exprimé la saison dernière. Les toros de Zacarías Moreno apportaient aussi une garantie après leur prestation à Colmenar Viejo fin août l’an dernier. De Morante de la Puebla tous les adjectifs traduisant son immense classe et torería ont déjà été dits et redits mais on doit se rendre à l’évidence : il est sans nul doute un torero d’époque laissant derrière lui une cohorte de bons exécutants de l’Art de Cuchares.  Son concept et expression du toreo restent uniques et ne peuvent être actuellement égalés.

Les toros de Zacarías Moreno offraient une réplique pas toujours parfaite, ce qui obligeait les trois matadors à faire un effort, répondre à l’attente du public qui les avait reçus au terme du paseo par une belle ovation.  Tous nés entre octobre et novembre 2017, de poids moyen de 486 kg, les toros ne permettaient pas à Morante de déployer son toreo de cape de réception – Diego Urdiales et Daniel Luque le pouvaient sans atteindre les sommets – car dès leur sortie en piste leurs charges étaient loin d’être parfaites, desiguales dirait-on. Oscar Bernal se distinguait en piquant le 5ème et dosant le châtiment en deux rencontres, la troisième al relance près des planches que ce toro affectionnait. Après la mono-pique de rigueur la faiblesse de la plupart des toros était patente.

Morante de la Puebla ne coupait aucun trophée après ses deux faenas malgré une forte pétition d’oreille au premier. Le burraco sorti en tête, fléchissait des pattes avant en plusieurs occasions… mais  les passes aidées par le haut du début de faena faisaient oublier ces problèmes, pleines de temple et torería, terminées par un remate de la gauche et passe de poitrine. Les naturelles qui suivaient étaient d’une rare beauté. La manière dont Morante « tirait » du toro, faiblard, sur la droite montraient une exquise technique. A la mort, il entrait avec lenteur et précision pour une estocade entière qui provoquait une hémorragie bucale. Le meilleur venait au 4ème qui se caractérisait par un coup de tête en fins de passes de réception, de surcroît suelto et descompuesto. En deux passes par le haut, ce défaut disparaissait presque par miracle et, peu à peu, le torero de la Puebla, serein et valeureux, des deux mains, réussissait des passes liées très méritoires. A partir de cet instant, tous les gestes de Morante étaient empreints de cette torería inimitable de naturel et domination à la fois. Pieds joints, il terminait par des passes en redondo, avec grâce, le toro à sa merci. Las, deux estocades défectueuses éliminaient l’octroi d’oreilles mais le public conquis demandait la vuelta al ruedo.

                          

Diego Urdiales recevait un toro vif par des capotazos  en levant les bras, A la muleta, il l’entreprenait par des passes hautes et trincherazos qui dans un premier temps ne calmaient pas ce toro, vif et bronco, parfois perdant aussi l’équilibre… Enfin venait une série de la droite et un derechazo énorme, long et « templé », quelques passes pieds joints aussi dans le plus pur style classique de Urdiales. Dominé, le toro capitulait en se dirigeant vers les barrières. Quelques doblones, un nouveau trincherazo et passe de poitrine pour la mise en suerte et porter une estocade un peu tombée mais efficace. Le 5ème était accueilli par des véroniques bonnes en début de série, plus inégales vers la fin au centre de la piste. Dans la muleta. la charge était irrégulière, avec cabeceo, et derrote final. L’absence de franchise du toro à l’amorce des passes, faisait douter le torero, les naturelles, une à une, redonnaient confiance à Diego. Le toro ne se livrait pas et, sur le point de décliner toute lutte – rajarse –, il compliquait la mise en suerte pour la mise à mort enfin obtenue avec une estocade arrière et tombée.

                            

Daniel Luque signait une grande faena au 3ème. Ce toro paraissait diminué et avançait au ralenti à la sortie de la pique, pour s’animer au tercio des banderilles. La faena de muleta débutait, magnifique, par des doblones, allant a más dans l’exécution de ces passes habituellement de châtiment mais qui dans ce cas étaient plutôt des caresses. Le toro se déplaçait, « humilié » avec classe et les passes de la droite furent d’une lenteur extrême, confirmant une qualité que, seul, le torero avait discernée. Toreo vertical, naturelles d’une suavité et d’un goût extrêmes, principalement du côté gauche, Daniel Luque exhibait une sérénité, une assurance qui faisaient merveille. Les obligatoires luquecinas mettaient le point final à cette faena mémorable mais les successifs pinchazos et une estocade entière rompaient l’embellie… Pour se racheter de cette amère déconvenue Daniel Luque accueillait genoux en terre le 6ème pour un seul capotazo suivi de plusieurs véroniques et chicuelinas basses en remate. A la muleta, le début était prometteur, des passes hautes, des trincherazos mais dès les premiers derechazos, ce toro se désunissait. Daniel Luque ne parvenait pas à le fixer totalement dans sa détermination à lier et forcer le toro à répéter les charges. Un trois-quarts d’épée et le succès s’envolait…

                            

Morante de la Puebla : pétition d’oreille non accordée ; vuelta al ruedo et grande ovation. Diego Urdiales : une oreille ; saluts. Daniel Luque ; grande ovation ; saluts. Hymne national (marche royale) après le paseo. Aux banderilles Juan Contreras et Alberto Zayas de la cuadrilla de Daniel Luque devaient saluer au 3ème, de même « Pirri » de celle de Diego Urdiales au 2ème. Grande ambiance et… embouteillages dans la petite commune de Valdemorillo

.Georges Marcillac

Photos de mundotoro.com

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