Mont-de-Marsan – 4ème de Feria de La Madeleine – Triomphe de deux géants face à deux toros rescapés d’un lot d’extrême faiblesse.

Que la sortie par la Grande Porte du Plumaçon ne cache pas la débilité extrême des toros de Nuñez del Cuvillo qui furent de pauvres comparses pour ce mano a mano original entre Enrique Ponce et notre compatriote Sébastien Castella. Les arènes combles, l’idolâtrie du public pour le torero de Chiva (Valencia) et l’admiration pour celui de Béziers, l’Orchestre Montois et son répertoire varié, les toros de Nuñez del Cuvillo primés de la San Isidro madrilène, les ingrédients d’une gran tarde étaient là pour marquer l’histoire de La Madeleine. Las, les acteurs de base de la corrida, les toros, faisaient défaut et ternissaient la fête. En effet la chance fut qu’Enrique Ponce, une fois de plus déployait toute sa science pour maintenir sur pattes le premier cuvillo et Sébastien Castella profitait du sixième plus costaud pour dessiner une faena complète et variée. Les quatre invalides du milieu, plus le sobrero du même fer sorti en quatrième position, ne faisaient que se traîner sur le sable montois après avoir subi le châtiment des piques (terme consacré pour désigner l’objectif de la suerte de varas, ici un euphémisme et un simulacre en piste). La présentation des toros de «El Grullo» – nom de la finca où sont élevés les nuñez-del-cuvillo – était correcte avec un bon point pour le sixième de belles hechuras, castaño de robe et bien armé. Toros en général sans complications sauf le sobrero nº 62 de nom « Gorrión » (moineau) un drôle d’oiseau (pardon !) qui se défendait dans la muleta maintenue fermement par Sébastien Castella.

Enrique Ponce recevait son premier sans vraiment le fixer, qui ne poussait pas du train arrière, virant sur ses pattes avant pour reprendre la direction de la cape. Après les piques et une première chute et un tercio de banderilles expédié où se manifestait la faiblesse crasse de l’animal, Enrique entamait son œuvre (de bienfaisance?) par des passes suaves pour ensuite, à distance, «citer» pour des derechazos dans une muleta convaincante de telle sorte que le bicho n’allait plus tomber! Les naturelles, sommet de la faena,  «templées» avec pour remates la passe de poitrine profonde ou bien le molinete classique ou à l’envers étaient l’exemple de la facilité dans la difficulté qu’exprimait le maestro. La charge courte du toro – et pour cause – ne gênait absolument pas le maestro qui, au contraire, restait dans le sitio et enroulait le toro autour de sa taille. Un pase circular, des passes aidées par le bas et pour conclure l’estocade arrière d’effet rapide valaient sans discussion les deux oreilles qui tombaient en même temps sous une ovation énorme. Les faenas au 3ème et 5ème ne méritent mention si ce n’est l’effort vain de Enrique Ponce de remplir une fonction, celle d’infirmier, pour donner l’illusion de toréer – peut-être est-ce aussi cela ?? – et d’agrémenter le trasteo de détails et gestes de grande qualité esthétique, changements de main, trincherillas, etc. Même l’Orchestre Montois jouait « L’aigle noir » de Barbara – mouvement divers dans le public –  vite escamoté faute d’intérêt et de durée de la faena face à un toro épuisé.

Sébastien Castella avait la chance de voir sortir du toril un joli castaño de nom « Volador » nº 133 de presque cinq ans, de belle prestance et qui, sans être passé honorablement par les piques, participait au succès du Bitterois alors qu’était déjà oublié celui d’Enrique Ponce, le désenchantement régnant après les lamentables quatre toros précédents. Comme à son habitude, la faena débutait par le double péndulopase cambio por la espalda – enchaîné par les passes de poitrine. Aussi bien du côté droit comme du gauche le toro chargeait avec vivacité et mettait bien la tête dans la muleta. Les passes étaient longues et les naturelles bien embarquées par le bas, «ouvrant» le tracé sans trop l’obliger le bicho et permettre le lié. Un pase circular assorti d’un changement de main allongeait la circonférence de la passe. Sébastien Castella poursuivait la faena comme pour compenser ce qu’il n’avait pu faire avec ses toros précédents. Doblones superflus près des planches. A cause de cela le toro se désunissait pour être mis en suerte pour la mise à mort pour enfin recevoir une estocade entière qui le fulminait. Les deux oreilles étaient accordées. Le 4ème était remplacé après s’être blessé à la patte avant droite… Le sobrero montrait les mêmes caractéristiques que ses congénères mais dans ses charges désordonnées, son cabeceo dans la muleta, ressortait un fond de bravoure qui surmontait sa faiblesse et le maintenait debout et actif. Sébastien Castella surmontait lui aussi ces difficultés et réussissait à lier les passes avec aplomb et technique sans laisser une seule fois accrocher la muleta. Même, le «temple» d’une passe isolée était la preuve d’une grande technicité et apportait une pincée artistique à la faena.

Pour les cuadrillas, de celle de Sébastien Castella, seul José Chacón se distinguait et saluait aux banderilles.

Enrique Ponce : deux oreilles ; applaudissements complaisants aux deux suivants. Sébastien Castella : applaudissements désabusés a ses deux premiers ; deux oreilles. Nombreux sifflets à l’arrastre de la plupart des toros.

Georges Marcillac

Photos: Costedat pour aplausos.es et André Viard pour mundotoro.com

Ce contenu a été publié dans France, Georges Marcillac Escritos. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.