Madrid 18 Mai 2019 – 5ème de Feria – Pablo Aguado entre silence et rugissement ! Le nouveau Prince de la Tauromachie.

Pablo Aguado a apporté à Las Ventas le silence de la Maestranza lorsqu’il a accaparé au sixième combat, l’attention de 23.000 âmes. Puis il les a fait rugir à l’unisson avec son toreo simple, pur, « templé » et sincère.  Certes Ginés Marin a coupé une oreille et Luis David Adame a bénéficié d’une pétition. Mais cela reste anecdotique. Qu’il soit dit que tout l’escalafón vient de se rendre compte que Aguado est une réalité. Répéter un toreo d’un tel niveau à Séville puis à Madrid, coup sur coup, est loin d’être anodin. Peu sont capables de le faire. Et aucune autre figura actuelle n’est capable de toréer comme Aguado l’a fait à Séville et aujourd’hui à Madrid. En deux prestations il a mis à mort le toreo moderne et convaincu l’Afición et le public de la force du toreo pur et classique. Je n’ai pas souvenir en 49 années d’afición d’avoir vu quelque chose d’aussi impactant.  La Tauromachie a un nouveau Prince. Il se nomme Pablo Aguado.

Le premier de Montalvo destiné à être combattu par Ginés Marín charge la cape de son matador avec une indolence notable.  Au cheval son engagement est suivi d’une fuite à toriles. La seconde pique est prise dans le même style que la charge à la cape.  La faena débute là où le toro l’a décidé. La première série droitière laisse espérer une envie des deux protagonistes. Toutefois le montalvo piétine et trébuche en alternance avec des charges engagées.

À gauche Ginés Marín arrive à lier a más une série au positionnement marginal appréciée par le conclave. La suivante plus engagée est “rematée” avec accrochage. Une autre série plus courte et moins accomplie précède un dernier passage à droite qui n’apporte rien de plus.  Des bernadinas fort exposées maintiennent le public en haleine. Entière desprendida. Avis. Oreille. Palmas et pitos au toro.

Ginés Marín, qui a l’opportunité d’ouvrir la Grande Porte, n’arrive à rien avec son second montalvo à la cape.  Au cheval, le toro s’emploie d’abord puis fait un micro second passage pour la forme. Quite de Luis David Adame par chicuelinas et revolera alors que la faiblesse du bicho est protestée par le Tendido 7.  Brindis au public. La faena débute par des fléchissements du toro. La charge est claire et Ginés Marín l’entame à gauche. Le vent et les trébuchements obligent le matador à changer de terrains pour repartir à zéro. Zéro sera en fait le résultat de la faena essentiellement à cause de la faiblesse du bicho Pinchazo et entière au pas de course. Avis.

Luis David Adame voulant se rendre a puerta gayola doit renoncer car il ne s’est pas compris avec le torilero.  Le montalvo met la tête et les reins dans les véroniques du Mexicain qui conclue la série à contre temps par larga cambiada debout et revolera de recours.  Mené au cheval par rogerinas, le toro pousse avec vivacité la monture avant de sortir seul. Son second passage confirme son manque de fond et de bravoure puisqu’il cherche à faire le tour du cheval et fuit de sa propre initiative.  Quite de Pablo Aguado qui donne le ton avec deux véroniques lentes, torées et une demi-véronique auquelles Adame réplique par zapopinas qui ne sont pas du même calibre. Brindis au public. À genoux, le Mexicain enroule le bicho qui lui laisse l’espace pour le faire. Les derechazos ne font pas honneur à la charge qui est dénaturée par les accrochages de muleta et le manque de lucidité du torero. Le meilleur vient à gauche dans plusieurs passages, plus aboutis, a más, puis a menos lorsque le toro, faute d’avoir été dominé, se désintéresse du combat.  Des bernadinas vulgaires précèdent une estocade a recibir en perdant la muleta. Pétition similaire à celle de Ginés Marín, mais l’oreille n’est pas accordée. Ovation au toro et vuelta pour Adame qui a laissé passer une occasion d’un grand triomphe face à un toro de deux oreilles.

Le conquième montre rapidement des signes de faiblesse du train arrière.  Il s’emploie cependant lors de deux piques. Luis David exécute un quite par navarras en étant mis en difficulté.  Plusieurs passages à droite sans transcendance, bien que liés, laissent les tendidos sur leur faim. À gauche le torero reste dans le même registre sans arriver à construire quoi que ce soit avec une charge dont le seul défaut est un calamocheo en deuxième moitié de muletazo.  C’est en fin de faena que le torero connecte brièvement avec le public. Bajonazo. Silence.

Le vent empêche Pablo Aguado de tester le troisième de Montalvo à la cape. L’animal a du mal à tenir sur ses pattes aidé en cela par les capes d’Aguado et Iván García. Mouchoir vert.  Le sobrero de Luis Algarra, un toro cinqueño, cornalón, fait subir une voltereta à Aguado dans le remate de sa série de véroniques.  Le bicho avance en balancier et va au cheval avec indolence. Quite de Ginés Marín par chicuelinas et revolera. Aguado prend du temps pour mesurer la charge qui est de qualité mais désordonnée. Le toro fléchit, le vent gêne et finalement le matador subit une nouvelle voltereta suite à un extraño. Le passage gaucher, bien qu’irrégulier, donne quelques muletazos de qualité que le Sévillan répète ensuite à droite.  Méfiant du large berceau, Aguado enfonce une demi-lame, puis une entière, les deux en bajonazo. Silence.

Le dernier montalvo charge sans « humilier » et sans intérêt dans la cape de Pablo Aguado. Au cheval le toro s’emploie. Brindis au public. Aguado met le feu dès le début de faena.  Tout est réalisé avec lenteur et une parcimonie de gestes ce qui convient parfaitement aux caractéristiques de l’adversaire.  L’esthétique est naturelle et simple, les séries courtes car le toro n’en supporterait pas plus.

                  

Le toreo à gauche est somptueux avec les vuelos, les toques précis.  Final par naturelles de troisquarts, réalisées une par une. Pendant toute la faena Las Ventas a alterné entre un silence d’absolue attention et le rugissement des olés de la pleine communion.  Une horrible épée contraire dans le flanc, puis pinchazos annihilent toute chance de trophée.

René Philippe Arneodau

Photos de Paloma Aguilar pour mundotoro.com

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Une réponse à Madrid 18 Mai 2019 – 5ème de Feria – Pablo Aguado entre silence et rugissement ! Le nouveau Prince de la Tauromachie.

  1. François Bernard dit :

    Bonjour
    Je suis tout à fait en accord avec votre analyse concernant Pablo Aguado. Par contre
    j’ai été ulcéré par le comportement irrespectueux, envers le toro et envers le public,
    de Gines Marin, mettant en suerte ses toros de façon calamiteuse et volontaire face
    aux picadores. Mais, nous sommes à Madrid, il ambitionne une place de choix dans
    l’escalafon, et, de plus, son père est picador! Si il fait ça en tienta, sur que le ganadero
    ne le réinvitera plus! Quand les présidences feront-elles enfin respecter le réglement?
    Paco

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