Séville 2 Mai 2019 – Séville, la généreuse, offre la Porte du Prince à « El Juli » et la vuelta à un toro de Garcigrande.

Arènes pleines et temps radieux. Lot de Garcigrande limite en présentation, force et agressivité. « El Juli » s’est vite débarrassé de l’oreille protestée par une partie du public à son premier, avant de faire la vuelta. Mais il n’a pas douté au moment de sortir par la Porte du Prince dans une ambiance relativement neutre. Séville va aux arènes voir les toreros et festoyer.  Le toro y est un collaborateur qu’elle honore pour avoir permis au torero de briller, faute de le faire pour ses qualité intrinsèques.

Il revient à Juan Antonio « Morante de la Puebla » d’ouvrir les festivités avec un toro de Garcigrande anovillado, cornidelantero, sans présence.  Le bichito fait le tour des lieux à plusieurs reprises avant que Morante ne fasse rugir la Maestranza en dessinant des véroniques sui generis dans lesquelles l’animal charge en ligne, sans force et sans terminer de suivre les passes jusqu’à leur terme.  Morante caresse à loisir les charges de carretón qui sont épargnées par le varilargero de service. La faena débute par ayudados por bajo qui font fléchir l’opposant. Celui-ci avance en sautillant dans les derechazos distillés sans effort, dans un style des plus sereins.  Puisque le toro tient le coup, Morante poursuit sur les deux cornes. Les rugissements initiaux du public laissent peu à peu place au silence. À torito anodin, faena sans relief. ¾ de lame portée à bout de bras en passant au large. Palmas et salut.

A mi-corrida, le public patient de Séville est toujours dans l’attente.  « Morante de la Puebla » allonge les bras et plie la jambe avant d’abandonner le toreo de cape face à la charge anodine de son second.  Le bicho subit l’épreuve du fer alors que le public commence à protester. Au second tiers la cuadrilla s’assure de mettre en évidence les scories de l’animal.  Le tanteo laisse cependant penser que Morante va construire une faena. Il produit quelques derechazos de belle plasticité, puis la charge inégale du toro entrave la tentative gauchère.  L’effort de Morante est autant visible qu’inhabituel dans de telles circonstances. Pinchazo et entière défectueuse. Silence.

Le second de Garcigrande est reçu par Julián López « El Juli » en véroniques et demie exécutées avec une parcimonie de gestes dont il a le secret. Entre les picotazos, le maestro exécute un quite dans lequel il dessine, entre autres, des cordobinas terminées enroulées comme des chicuelinas bras croisés.  Miguel Ángel Perera, quant à lui, intervient par gaoneras. À la plénitude du toreo de « El Juli » répond l’absence de transmission du toro Durant le second tiers le garcigrande s’anime. Brindis a Manuel Benítez « El Cordobés ». « El Juli » met le toro dans la muleta sans rectifier sa position en exécutant passes par le haut et de côté.  Alors que la musique joue, « El Juli » impose à l’animal des trajectoires dont celles sur la corne gauche sont les plus notables dans un style plus vertical et épuré qu’à droite. Il termine par luquesinas et remates por bajo destinés à affirmer sa domination à toro rajado. Un pinchazo suivi d’une entière dans le style maison reçoit l’approbation des tendidos qui demandent l’oreille accordée dans la division.

Le cinquième fait une sortie vive et prometteuse dans les circonstances du jour.  « El Juli » guide l’indifférence du garcigrande jusqu’au centre en va-et-vient. Bien piqué par José Antonio Barroso, le toro a des réactions de manso en sortie de première pique.  « El Juli » le fixe dans un quite par véroniques en gagnant du terrain entre chaque capotazo. La seconde pique est un simulacre. « El Juli » va aux tercios pour un début de faena droitier rempli de détails techniques, alternant allongement de passes, muleta pulsée ou laissée traînant au sol, ou encore en gestuelle minimaliste.  À gauche la technique est plus directe, tirant des lignes et des courbes avec les vuelos de la muleta au ras du sol. L’animal a juste assez de force pour permettre à « El Juli » de parfaire son oeuvre qui peu à peu revient aux techniques du toreo moderne, corps hors trajectoire et muleta laissée sous le mufle afin de lier à droite. Alors que le toro est sur le point de capituler,  « El Juli » reprend la gauche pour enrouler une dernière fois le toro en allant vers les tablas. Le « julipie » laisse une épée tombée et horizontale. Deux oreilles réclamées et accordées ainsi qu’une vuelta al ruedo imaginaire pour le Garcigrande.

Miguel Ángel Perera dessine des véroniques appliquées au troisième dans un silence total brièvement rompu par un “bien” dans le remate.  Le garcigrande subit les picotazos lors de deux passages réglementaires au cheval. Javier Ambel brille « au balcón » et salut au second tiers.  Brindis personnel. Le début de faena, droitier, parfaitement exécuté techniquement, n’obtient que peu d’écho sur les gradins. Tout est méthodique et c’est la répétition qui peu à peu réveille le conclave. À gauche après un écart, M.A. Perera parvient à lier avec la même efficacité technique qu’à droite encore une fois dans le silence. Les va- et-vient anodins du toro ne font vibrer personne.  Entière desprendida. Palmas.

Perera affronte en dernier le plus lourd du lot.  Les véroniques sont suaves et sans intérêt. L’animal pousse sans efficacité sous le fer,  puis évite la seconde rencontre qui se limite à un picotazo à la sauvette. M.A. Perera entre en quite pour des chicuelinas ajustées, cordobina et larga.   Javier Ambel s’applique dans la lidia du second tiers et Curro Javier brille aux banderilles ce qui lui vaut de saluer. Ovation pour Ambel. Brindis au public. Au centre Perera cite pour un péndulo suivi d’un enchaînement sans bouger autour de lui.  La charge transmet. La première série droitière canalise efficacement une charge vive et répétée. Musique. La suite va notablement a menos à l’instar du toro. Avec ce qui lui reste de gaz, Perera entame une virevolte droitière. Le passage à gauche est haché et la muleta souvent accrochée. La musique s’arrête.  Le final droitier est poussif. Pincbazos en prenant le large et demi-lame atravesada.

René Philippe Arneodau.

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2 réponses à Séville 2 Mai 2019 – Séville, la généreuse, offre la Porte du Prince à « El Juli » et la vuelta à un toro de Garcigrande.

  1. Emmanuel dit :

    Bonjour René Philippe,
    Je me permets une toute petite précision : le brindis « personnel » de Perera était à son ancien apoderado (et ami) Fernando Cepeda.
    ( je n’ai aucun mérite… étant (hélas…) devant mon écran et non pas « in situ » !)
    Un muy cordial saludo,
    Emmanuel

  2. Emmanuel dit :

    Bonjour René Philippe,
    Je me permets une toute petite précision : le brindis « personnel » de Perera était à son ancien apoderado Fernando Cepeda.
    (Je n’ai aucun mérite…. j’ étais (hélas…) devant mon écran et non pas « in situ »!)
    Un muy cordial saludo,,
    Emmanuel

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