Mont-de-Marsan – 21 juillet 2022 – 2ème de La Madeleine – Les toros de Hnos García Jiménez impropres à la « corrida des artistes ». Tomás Rufo coupe néanmoins une oreille au 6ème.

Ce titre s’appliquerait de toute manière à toute autre affiche que celle de la corrida de ce jour qui réunissait Morante de la Puebla, Juan Ortega et Tomás Rufo, le dernier jeune « alternativé » et qui prétend jouer dans la cour des grands. En effet, les arènes du Plumaçon, à 99% garnies, présentait l’aspect des grands jours et le visage des aficionados reflétaient, à l’entrée, l’espoir que suscite un grand cartel. Les mines et les commentaires à la sortie traduisaient une déception dont l’origine était le lamentable comportement des toros de Hermanos García Jiménez (de la « Casa Matilla»(*)) mal présentés pour une place de première catégorie, de surcroît dépourvus de caste et forces suffisantes pour offrir le spectacle que raisonnablement on attend d’une corrida de toros. Sans avoir mauvais esprit, on peut tout de même penser que la empresa actuelle et la Commission Taurine Municipale devraientt surveiller de près les veedores des vedettes pour ne pas décevoir, et même tromper. le public qui à plusieurs reprises avait scandé « des toros ! des toros ! ». Des toros de quatre ans, peu encornés, d’une noblesse certaine mais insipide, qui ne durait pas par manque de force. Le 4ème, s’étalait de tout son long à la sortie de la première pique après qu’il eût montré une course à la limite de la décoordination. Il devait être remplacé par un sobrero du même fer.

Morante de la Puebla, habillé d’un vestido de torear, classique, couleur obispo (esp: évêque) nous régalait, d’entrée par une succession de largas  changeant de main à chaque passage du premier toro de nom « Delicado ». Ce dernier devait d’ailleurs être traité avec délicatesse, ce que fit Morante tant à la cape qu’à la muleta, aussi bien que l’avait fait le picador de service…. La faena se résumait en des passes dont l’objectif était de maintenir debout le bicho, de l’inciter à avancer à la voix avant qu’il ne put point le faire. Deux pinchazos et un descabello. Le sobrero de nom « Derribado » (esp : démolí !!) remplaçant un « Filosofo » (on doit bien s’amuser à la Casa Matilla pour baptiser ainsi les toros…) ne valait guère mieux, suelto comme tous ses congénères. Il ne se passait vraiment rien, l’insipidité du trasteo de Morante, le « chasse-mouche » final précédaient une série de pinchazos qui venaient à bout de l’animal.

                              

Juan Ortega avait montré tout son talent dans un quite par véroniques super-lentes au premier de Morante comme il ne cessait de distiller des passes d’une élégance, d’un cachet personnel inimitables avec ses deux opposants. A moindre dose au 2ème qui très vite cessait d’avancer, beaucoup mieux avec le 5ème qui chargeait avec brusquerie et obligeait Juan de « perdre » des pas pour ensuite profiter de l’élan pour enfin dessiner des passes des deux mains de grande classe. Ce toro se calmait et dans de légers déplacements Juan Ortega le conduisait avec  grâce, dans une gestuelle qui à elle seule ravissait car le toro, lui, ne transmettait rien. Des passes aidées, des molinetes, des remates de la gauche, la muleta « morte », tout un florilège de suertes composaient une faena  que certains jugeront incomplète, peut-être inexistante, qui, plus prosaïquement, s’achevait par deux pinchazos assortis d’un descabello.

                              

Tomás Rufo touchait sans doute les « meilleurs » toros de l’après-midi surtout par leur mobilité et l’absence de chute. Le 3ème, suelto, galopait dans tous les sens, tendait vers les barrières et même recevait al relance la première pique, non appuyée par le picador, ni poussée. Le tercio de banderilles se déroulait sans éclat en tirant profit de la mobilité du toro. Muleta en main, le Tolédan, par doblones, parvenait à le fixer pour ensuite le « citer » à bonne distance toujours profitant de sa course et l’ « obligeant » de telle sorte que ce toro s’affalait du l’arrière-train. La suite ne consistait qu’en des passes sans transmission, sans style et sans force ni classe de la part du toro. Des naturelles, allongeant le bras, pieds joints, le toro à bout de force et sans entrega, il était temps d’en finir : une estocade arrière et tombée. Applaudissements pour la volonté du jeune matador. Le 6ème, de meilleure présence, cornes large ouvertes, était accueilli par une larga cambiada de rodilla suivie de quelques passes en tablier pour fixer le toro lui aussi de nom suspect « Esaborío » (esp :insipide, sans substance, désagréable…). Placé au centre de la piste, il chargeait d’un bon élan la cavalerie, sans vraiment se livrer et le picador était applaudi…. Le meilleur venait pour les paires de banderilles posées par Fernando Sánchez en premier pour épargner Juan Antonio Carretero, qui doit se retirer cette année, mais qui remplissait magnifiquement son rôle en clouant les banderilles, « au balcon » face au berceau des cornes ! La faena, entamée genoux en terre de Tomás Rufo, réveillait le public désabusé par tout ce qui avait précédé, encourageait le torero qui « citait » de loin le toro qui baissait la tête dans la muleta mais qui la relevait en fins de passes. La suite baissait de ton, deux chutes du toro, naturelles al hilo, faciles mais sans intérêt abusant d’une technique suspecte pour un jeune torero prometteur… Les passes aidées par le haut et une naturelle basse laissaient le toro cadré pour une estocade arrière tombée et une oreille était accordée sans valeur pour une faena quelconque et pour sa finition.

                              

(*) Casa Matilla : Entreprise taurine familiale de la localité salmantine de Matilla de los Caños dont Teodoro García en est le fondateur, veedor pour Pedro Balaña et la plaza de toros de Barcelone. Son fils, de même nom, sera le gestionnaire de plusieurs arènes en Espagne et de la carrière de plusieurs toreros. Propriétaire de l’élevage de toros Hermanos García Jiménez, la dernière génération de la Casa Matilla domine et gère de ce fait les trois axes du monde taurin : arènes, élevages de toros et toreros dont, actuellement « El Fandi » et José María Manzanares, et précédemment Juan José Padilla et Morante de la Puebla.

Morante de la Puebla : silence ; sifflets… Juan Ortega : silence aux deux. Tomás Rufo : silence ; une oreille. Les deux banderilleros de la cuadrilla de Tomás Rufo, Fernando Sánchez et Juan Antonio Carretero, étaient invités à saluer après la pose des banderilles au 6ème. Plusieurs toros étaient sifflés à l’arrastre.

Georges Marcillac

Photos de Philippe Gil Mir pour burladero.tv

Ce contenu a été publié dans Georges Marcillac Escritos. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.