Madrid 22 mai 2019 – 9ème de Feria – Andrés ROCA REY: un roi qui n’abdique pas. Nouvelle Puerta Grande à Las Ventas.

Le règne d’Andrés Roca Rey ne fait que commencer mais il n’y a plus de doute: c’est lui qui attire le public, qui remplit les arènes et paye de sa personne pour qu’aucun matador de toros actuel ne lui dispute le trône. Aujourd’hui, le jeune Péruvien a révolutionné la plaza de Las Ventas au sixième toro de la corrida de Parladé. Ce toro de nom «Maderero» nº 22 de 565 kg et cinqueño comme ses congénères sortait des toriles sans trop de course, emplazado, sortant suelto de la première pique, faisant «sonner» l’estribo, allant pour une deuxième au picador de réserve, fuyant les capes, distrait et rendant hasardeuse la pose des banderilles. Ces signes de mansedumbre n’auguraient rien de positif pour la deuxième faena de Roca Rey que l’on attendait d’autant plus que la première n’avait pas été brillante après avoir écopé une impressionnante voltereta et légère cornada (10 cm cuisse droite et opération à l’infirmerie qui ne l’empêchait pas de réapparaître pour toréer ce 6ème) et dégâts vestimentaires, dès les premiers capotazos.

              

Après un brindis au public qui doutait, ARR «citait» le toro pour un péndulo triplé, le deuxième à contre-querencia, le tout au centre de la piste et il l’enroulait autour de sa taille par le bas et se libérait par une passe de poitrine. Cette entame était contraire aux conditions initiales de ce toro, maintenant transfiguré. Ovation. Toujours au centre, «citant» de loin, les séries de la droite révélaient des qualités du parladé, des charges vives de grande transmission dans la muleta/catalyseur du torero qui allait se grandir encore plus dans des naturelles «longuissimes» avec un jeu de poignet qui remettait le toro dans la muleta pour un enchaînement suprême. A la fin d’une série de la droite, survenait un changement de main et une naturelle en redondo de 360 degrés ! Le public debout applaudissait à tout rompre ! La muleta, basse limait quelques velléités d’extraño du toro. Les bernadinas finales avec changement «de voyage» au moment de l’embroque électrisaient le public debout, subjugué, extasié. L’estocade portée avec décision ne laissait aucun doute quant à sa position et efficacité, le toro était blessé à mort. Les deux oreilles tombaient sans discussion possible. Le toro était même applaudi à l’arrastre car il avait extrait de ses entrailles une bravoure insoupçonnée propre à celle des grands toros de l’encaste Domecq. A son premier, un sobrero de Conde de Mayalde, sans raison aucune, ARR se passait la cape dans le dos pour une gaonera qu’il ne pouvait terminer, étant soulevé et repris en l’air par un toro qui savait jouer de la tête, comme il le montrait au cours de la faena de muleta. Les statuaires du début, les différentes séries suivantes n’éliminaient pas le cabeceo dans des charges terminées par un hachazo. Cette faena allait a menos, le toro finissait par abandonner le combat – rajado. Le coup d’épée, d’effet rapide, n’était que le résultat d’un bajonazo… face aux tendidos de soleil qui applaudissaient…

Manuel Jesús «El Cid» était accueilli par une ovation pour saluer une longue carrière qui prendra fin au terme de cette temporada et le remercier de ses succès passés à Las Ventas. Le premier parladé pesait 588 kg et se traînait avec noblesse mais sans transmission aussi bien à la cape qu’à la muleta et permettait une faena tout en douceur, principalement sur la corne droite. Sur la gauche, les naturelles n’étaient pas autant limpides. Les charges se réduisaient mais conservaient leur constance dans la muleta. Un pinchazo précédait une demi-estocade un peu tombée. Les timides applaudissements sanctionnaient ainsi une prestation sans relief. La dernière de «El Cid» à Madrid ne pouvait être le résultat escompté, une despedida honorable, certes, mais le toro, haut sur pattes, sans classe et sans codicia, ne permettait qu’une faena insipide malgré le calme et fermeté du torero de Salteras (Sevilla). Un pinchazo hondo suffisait avant plusieurs des descabellos et un avis. Néanmoins Manuel Jesús « El Cid » recevait une ovation à laquelle il répondait, ému, une poignée de sable de Las Ventas à la main.

Alberto López Simón coupait une oreille à son premier après une faena «standard» composée de passes bien tracées selon le même schéma – trois passes à droite ou à gauche et passe de poitrine profonde – excepté un cambio por la espalda et la conclusion par bernadinas exposées. Les statuaires du début et l’enchaînement par une passe par le bas et la passe de poitrine, les pieds cloués au sol profitaient d’une bonne charge du parladé, prompt au démarrage et noble. L’estocade décisive, desprendida, valait une oreille sans que ce prix fût le résultat d’une faena remarquable. Le 5ème, un toro de 626 kg, traînait sa mansedumbre, parfois à la limite de la chute, pour finir près des tablas où López Simón lui servait des passes en va-et-vient, pratiquement collé aux planches. Finalement il lui portait un pinchazo hondo et un descabello après une marche funèbre sur la moitié de la circonférence de la piste jusqu’aux toriles. La réception a puerta gayola avait été ratée et sans suite pour des capotazos entraînant la fuite de l’animal.

Manuel Jesús «El Cid » : silence ; un avis et ovation. Alberto López Simón : un avis et une oreille ; saluts? Andrés Roca Rey : un avis et silence ; un avis et deux oreilles, sortie a hombros. Les toros de Parladé portaient une devise noire en signe de deuil pour le décès récent de Fernando Domecq, frère de l’éleveur Juan Pedro Domecq. Présents en barrera du tendido de toriles, le roi émérite Juan Carlos I et l’Infante Elena. Temps ensoleillé. 23.624 spectateurs. No hay billetes.

Georges Marcillac

Photos de Javier Arroyo pour aplausos.es

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