Madrid 30 septembre 2023 – 1ère de la Feria d’Automne – Emoción et maestría de El Juli pour ses adieux à Las Ventas. Deux oreilles au 5ème. Mansada des toros de Puerto de San Lorenzo.

L’annonce faite fin juillet dernier par Julián López “El Juli” de sa prochaine retraite, après 25 ans d’alternative, a évidemment marqué cette fin de saison 2023. Ses adieux dans les arènes de France et d’Espagne furent marqués d’émotions ainsi que de succès retentissants. La date limite étant le dimanche 1er octobre à Séville, la présence de “El Juli” à l’affiche d’aujourd’hui, à Madrid, revêtait une importance majeure car c’est dans la capitale, dès l’âge de huit ans, qu’il faisait ses premiers pas dans la carrière taurine, enfant prodige et élève de l’École Taurine “Marcial Lalanda” et qu’il toréait en solitaire sa dernière novillada à Las Ventas, le 13 septembre 1998. Il était chez lui!  Il prenait l’alternative cinq jours plus tard, à Nîmes. Un quart de siècle! d’une carrière, celle d’un maître es-tauromachie, qui laissera des journées de gloire à Madrid, le souvenir de faenas mémorables pour sa maestría face au toro, son style classique et dépouillé, sa volonté de s’imposer devant un public parfois hostile, au minimum circonspect, traitement généralement réservé aux meilleurs auxquels on ne passe aucune excuse. “El Juli” s’en va néanmoins revêtu de la pourpre des matadors d’époque universellement reconnus.

En ce jour d’ouverture de la Feria d’Automne, le public était venu à 100%, quoi qu’il arrive, prenant fait et cause pour Julián López “El Juli” dont on attendait un triomphe qui n’est arrivé qu’au 5ème, un toro de Puerto de San Lorenzo, abanto d’abord et manso déclaré par la suite, sans intérêt sous le cheval, charges irrégulières ou fuites, qui en d’autres mains aurait justifié un trasteo d’aliño. Malgré cela, après un capoteo inexistant, le brindis de “El Juli”, ovationné par le public debout, indiquait son intention de terminer en beauté, une dernière fois, sur le sable de Las Ventas. Ce qu’il fit. Le tanteo marchant vers le centre de la piste sans “obliger” l’animal, le faisant passer simplement dans la muleta qui, peu à peu, le fixait. Venaient ensuite des cites à distance pour lier des passes de la droite, changement de main pour continuer de la gauche, des naturelles baissant la muleta. L’emprise sur le toro était totale, en l’absence de passes de qualité, d’esthétique, il s’entend, mais de fermeté dans le placement et proximité dans les naturelles ou adornos finaux. De la belle ouvrage avec en conclusión une estocade dans un volapié sui generis. Les deux oreilles étaient accordées étant données les circonstances… public conquis. Au 2ème, de La Ventana del Puerto, “El Juli” brillait à la cape par des véroniques de réception et trois demies et lors d’un quite par chicuelina et cordobina et… fuite du manso qui, dans la muleta, n’allait guère mieux: “protestation” et quelques trébuchements. “El Juli” le forçait à charger, le maintenait dans des passes liées, changement de main pour le reprendre sur la gauche. Le toro sans se livrer n’admettait pas plus que deux ou trois muletazos y compris la passe de poitrine. Pour terminer, les passes par le bas vers le tercio étaient du goût du public.  Elles laissaient le toro cadré pour une estocade en julipié, entière, trasera. Pétition d’oreille non satisfaite.

          

José Ignacio Uceda Leal, tête de cartel aujourd’hui (de la promotion antérieure à celle de “El Juli” de l’Ecole Taurine de Madrid) pouvait avec patience réaliser une faena à son premier qui n’inspirait guère confiance: sortie au pas, arrêt face au picador, très peu piqué et fléchissement des pattes avant, seulement réactif au deuxième tiers, poursuivant les banderilleros… Le brindis à “El Juli” paraissait de pure formalité car le toro n’en valait pas la peine. Malgré cela dans un trasteo sûr et sobre, le torero d’Usera (quartier populaire de Madrid) parvenait dans plusieurs séries des deux mains à passer ce toro peu collaborateur, de charges descompuestas. Les naturelles “donnaient de l’air” au toro pour le reprendre dans un tracé plus serré. Dans une série, il passait la muleta de la gauche à la droite pour terminer par un magnifique derechazo, long et “templé”. `Le toro n’en pouvait plus, il chutait même à la suite d’une tentative par ayudados por alto et naturelles. Estocade caidilla. Toro amorcillado. Malheureusement il n’y eut pas de faena, ni rien, si ce n’étaient que des courses désordonnées, en fuite constante du 4ème, un modèle de mansedumbre, à la cape, seulement des picotazos à la sauvette et à la muleta poursuivi par Uceda Leal qui, en désespoir de cause, prenait l’épée et plaçait l’estoc après une longue chasse le long du périmère des tablas. Un descabello.

Tomás Rufo coupait une oreille au 6ème, après une faena et brindis à “El Juli”. La faena était une déclaration d’intentions car après le succès de son aîné, il fallait coûte que coûte se montrer à la hauteur, si c’éait posible… Le toro qu’il affontait était un autre manso qui avait chargé sans entrain les premiers capotazos et essuyé deux piques ratées dans un premier temps, rectifiées et placées de côté. Il se déplaçait à loisir au tercio de banderilles. Le Tolédan “citait” à genoux le toro qui passait et s’enfuyait. Le changement de terrain était un bon choix car. de nouveau agenouillé, il dessinait une série de plusieurs passes en redondo, “templant” une bien meilleure charge, vive et dans la querencia maintenenant, terminant debout par un pase del desprecio. Ovation. Ensuite, une série de derechazos était couronnée d’une passe de poitrine énorme, en tour complet. Sur la gauche, ce n’était pas pas aussi bien ficelé mais l’effort était patent pour enchaîner les passes et garder dans la muleta le toro un tantinet fuyard. Des derechazos sans l’épée ayuda, position corrigée passe après passe, étaient fêtés par le public chauffé à blanc. Les manoletinas finales liées en remate à une passe de la droite, puissante et pase de pecho, sans enmendarse. terminaient une faena qui avait profité des conditions modestes du toro lâcheur. Estocade desprendida et un peu en arrière. Par des véroniques en forme de brega, d’autres en delantales, avaient pour but de garder un toro, le 3ème, de la Ventana del Puerto, qui ne dépareillait pas au reste du lot… Le tercio de varas était animé et révélateur. Une première pique arrière et bougée, le toro soulevait le cheval par le poitrail et provoquait la chute. Naturellement la seconde était prise avec le picador en réserve dans le terrain “naturel” du toro manso. La vertu de Tomás Rufo fut de s’accomoder d’une charge discrète et de la “templer” mais son toreo de profil était trop visible et les protestations des puristes furent nombreuses. En pure perte, compas exagérément ouvert et croisé, ce changement d’attitude , des doblones finaux, ne permettaient pas de remonter le courant. Une estocade un peu tombée et plusieurs descabellos.

De présentations et poids aceptables, les quatre de Puerto de San Lorenzo et les deux de La Ventana del Puerto (2ème et 3ème) ne soulevaient aucunes réactions à leur sortie du toril, plutôt des doutes plus tard confirmés pour leur mansedumbre et comportement erratique. Sans trop s’employer, il restaient sur pattes. Les deux derniers, curieusement, les seuls cinqueños du lot étaient ceux qui permettaient deux faenas. On retiendra le nom de “Faraón” nº 136 de 520 kg. né en abril 2018, toro de la despedida de “El Juli” à Las Ventas.

José Ignacio Uceda Leal: saluts; silence. Julián López “El Juli”: saluts; deux oreilles et sortie triomphale par la Grande Porte emporté par la foule…. Tomás Rufo: un avis et silence; une oreille. Andrés Revuelta et Fernando Sánchez, de la cuadrilla de Tomás Rufo, saluaient après la pose des banderilles au 3ème. Corrida à guichets fermé: 22.964 spectateurs.

Georges Marcillac

Photos Plaza 1

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