La liturgie du Medio Toro.

Sommes-nous condamnés à ne voir de grandes faenas qu’avec le medio toro moderne.  Si j’en crois les réactions, ou plutôt l’absence de réaction du public de Séville pour le triomphe de MANZANARES face aux Victorianos  del  Rio, la réponse est oui.  Personne dans la Maestranza ne s’est ému de la différence de présentation ou de comportement des bichos du jour comparés à ceux des jours précédents.  Que Manzanares ait magnifiquement toréé ne fait aucun doute, mais il l’a fait avec le prototype de ce qui fera probablement le déclin et la perte de notre passion.  J’ai d’ailleurs eu la sensation tout au long de la corrida que tous les toreros avaient perdu le respect aux toros du jour.  C’est aussi cela qui explique l’extraordinaire tiers de banderilles au quinto.  La question qu’il faut se poser c’est s’il est encore temps de concilier les différents points de vue.  Je me souviens que Manzanares avait combattu  la corrida d’ « El Pilar » à Bilbao, ganaderia qui avait envoyée des exemplaires massifs et ganaderia où le medio toro n’a pas encore tout emporté.  Je crois en son toreo et ses capacités comme celles de Morante et de Juli.  Mais c’est face à un adversaire porteur des gènes combatifs, sauvages, que je désire les voir s’exprimer et formuler leur Maestria.  Et là aussi je ne demande pas à tomber dans l’excès inverse et qu’ils soient confrontés à des  toros impossibles chaque après midi,  bien que parfois certaines rencontres auraient un intérêt réel pour l’aficionado, une corrida de Moreno Silva combattue par trois figuras par exemple.    La réalité est cependant bien triste.  Les corridas de Toros exigeantes sont toréées par des toreros de second rang, devant des gradins  non remplis.  Les arènes se remplissent pour voir le medio toro avec les figuras.  Il sera très difficile de renverser la vapeur.  Ce que je crains c’est qu’en cas d’excès, ce public qui va aux arènes encore maintenant, finira par se sentir gêné d’aimer un spectacle où le toro passe plus pour un outil sans émotion que comme un acteur qui déclanche la peur, et décide de ne plus aller aux Arènes.  Ce phénomène pourra venir de la conjonction de l’excès du medio toro et des attaques anti corrida.  Je vais vous confier un secret à propos de la corrida de Victoriano del Rio de Séville.  Oui j’ai vu Manzanares magnifiquement toréer.  Mais parce que je vais aux arènes à los toros, je n’ai pas sorti une seule fois le mouchoir de ma poche en cette après midi festive.  Les grands toreros du G10 ont plus que les oreilles dans la main droite et l’argent dans la gauche.  Ils ont le pouvoir de définir ce que sera la corrida des années à venir ou la responsabilité de la voir disparaître.  Faut-il n’être que défaitiste ?  Peut-être pas.  Regardons ce qu’il s’est passé pour les toros de Las Vegas.  Après la tentation du départ,  les figuras ont su se retirer de cette expérimentation désastreuse.  Même si je suis terriblement inquiet,  je veux garder l’espoir qu’un ou plusieurs toreros de premier rang se rendront compte des risques que la fiesta encourt et feront, comme Antonio Bienvenida à propos de l’afeitado, une démarche marquée du sceau de la vérité et de l’intégrité.  S’ils sont grands, ils peuvent le faire.  Manzanares est grand.  Ses compagnons aussi.  René Philippe Arneodau

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