2023. Une année décisive pour un posible renouveau?

Durant ce mois de janvier qui s’achève, ont vu le jour les affiches et programmes des premières ferias taurines de 2023. Cette année prétend donner un élan nouveau à la Tauromachie soumise ces derniers temps à l’épreuve de situations à la fois inquiétantes et mais aussi pleines d’espoir. Après l’arrêt dû à la pandémie de la Covid-19, il fallait s’attendre à une reprise du rythme des férias et du nombre de spectacles et, surtout, du retour aux arènes d’un public “à la diète” forcée depuis deux ans. Cette attente s’est confirmée car l’analyse de la temporada 2022 faite par Diego Sánchez de la Cruz (Economía del Toro d’après ANOET) montre, qu’en Espagne, le nombre de corridas enregistrées est le plus élevé de ces dix dernières années en ayant atteint le chiffre de 436 festejos. Quant à la France taurine, les résultats sont plus mitigés car le nombre de corridas s’est stabilisé autour de 70 avec des variations de ± 5 au cours de la dernière décennie exception faite de la chute vertigineuse des exercices  2020 et 2021. Le regain enregistré outre-Pyrénées est dû à plusieurs facteurs dont le plus significatif est l’”effet Morante” produit par le désormais indiscutable torero d’époque qu’est le torero de la Puebla del Rio.

 

Par son esprit volontariste et généreux, il avait programmé 100 corridas pour sa saison! Son défi accompli, il a permis une certaine regénération du toreo et surtout d’attirer le public le plus varié, nouveau ou assidu,  n’hésitant pas à toréer dans des arènes de troisième catégorie. Le contrepoint à ce phénomène est la tonitruante saison d’Andrés Roca Rey qui, le seul, assure le remplissage des arènes souvent à guichets fermés. Si l’on peut compter sur le Péruvien pour maintenir le rythme de ses contrats et probables succès, il est certain que Juan Antonio Morante ne renouvellera pas cette année sa performance tout en conservant son aura d’artiste génial et rénovateur. L’avenir nous dira si des valeurs affirmées et d’autres montantes – Daniel Luque, Ginés Marín, Ángel Téllez, Francisco de Manuel – ajoutées aux vétérans – “El Juli”, José María Manzanares, Alejandro Talavante, Sébastien Castella – sauront maintenir l’intérêt du public malgré les difficultés économiques que traversent nos deux pays. Il est aussi encourageant de noter une augmentation du nombre de novilladas piquées avec un total de 286 spectacles  en 2022 soit +25% par rapport à 2019 et supérieur à celui des dix dernières années. Cela suppose à la fois un intérêt croissant pour les novilladas ainsi que l’apparition de nouveaux talents qui, espérons-le, seront la relève du futur. En France, c’est la stabilité, 31 novilladas en 2022 et 32 il y deux ans (info TOROS) avec toutefois une baisse de # 25% par rapport à la décennie précédente. Les novilleros émergents sont Victor Hernández, Jorge Martínez, Álvaro Alarcón (prochaine alternative), Diego García, Sergio Rodríguez, Christian Parejo, Yon Lamothe, Marcos Linares, tous ayant signé plus de 20 novilladas en 2022…A eux de confirmer leurs qualités et évolution.

La grande inconnue pour cette année taurine qui s’ouvre est évidemment de savoir si la progression de ces chiffres se confirme et surtout si elle est accompagnée de la qualité. Les derniers mouvements, ruptures et accords d’apoderamiento, restructurations d’empresas, recomposition des cuadrillas, annonces prématurées des cartels des ferias importantes, montrent à l’évidence que le monde taurin bouge. La précipitation avec laquelle les sociétés chargées de monter les ferias ont dévoilé dès janvier la participation des figuras, le choix des ganaderías et les combinaisons qui en dépendent, est le signe d’une nervosité face à une situation critique: diminution du cheptel et pénurie de toros de garantie en raison des crises précédentes, accentuées par la pandémie, désaffection du public qu’il faut impérativement ramener ou capter, augmentation des coûts de production, campagnes anti-taurines et politiques. Tout cet ensemble d’éléments négatifs doit être géré pour la continuation de la corrida qui ne survivra qu’avec l’organisation de spectacles qui maintiendront l’intérêt d’un public nombreux et fidèlisé.

Les quatre ferias importantes de ce premier trimestre sont: la feria de la Candelaria de Valdemorillo (Madrid) en février, la feria del Toro de Olivenza (Badajoz), celles de la Magdalena de Castellón de la Plana et des Fallas de Valencia au mois de mars.

         

Vingt matadors se partagent les postes de ces premières ferias et sans nul doute ils seront la base des corridas et ferias du reste de l’année. Julián López “El Juli” et Andrés Roca Rey sont les seuls à être présents pour les trois ferias de mars. Les ferias de Castellón et de Valencia se dérouleront aux mêmes dates. Ces deux capitales (de la même región) sont distantes de 75 km par la route. Ainsi plusieurs matadors n’auront donc pas beaucoup de déplacement entre les deux villes… Parmi eux, Tomás Rufo et Francisco de Manuel, deux jeunes matadors qui “entrent dans la cour des grands” Seuls “Román” chez lui à Valence, Leo Valadez (Mex.) et Ángel Téllez deux nouveaux aussi, Juan Ortega, en mano a mano avec Diego Urdiales à Valdemorillo, et Sébastien Castella à Valence n’ont obtenu ou pu n’obtenir qu’une seule place dans ces quatre ferias. Paco Ureña se produira deux fois à Valence. Le rejoneador complètera l’affiche avec deux toreros à pied: Alejandro Talavante et Tomás Rufo à Castellón, Antonio Ferrera et Leo Valadez (Mex.) à Olivenza qui affonteront des toros de Victorino Martin qui, justement, seront aussi à l’affiche de Castellón et Valence. Donc, les réputés victorinos  commencent fort cette saison.

Le choix des élevages se concentre sur des “valeurs” sûres, prisées des figuras car aussi garantes des qualités qui leur permettent de briller mais aussi… d’attirer les foudres des aficionados qui rejettent les ganaderías “comerciales”! Donc, on trouvera principalement des produits d’origine Domecq: Nuñez del Cuvillo à Olivenza, Victoriano del Rio/Toros de Cortés et Jandilla à Valencia; Juan Pedro Domecq à Castellón et Valencia; Montalvo à Valdemorillo et Valencia; Domíngo Hernández/Garcigrande à Olivenza et Valencia; Hnos García Jiménez/Olga Jiménez à Castellón. Seule exception, des toros de Puerto de San Lorenzo (encaste Atanasio Fernández/ Lisardo Sánchez) s’opposeront à Valence en un “desafío ganadero” avec les déjà cités domingo-hernández/garcigrande.

Demain 1er février aura lieu à Las Ventas le gala de présentation officielle des cartels de San Isidro concoctés par Plaza 1 dont on a pu avoir des aperçus ces derniers jours,  publiés par les portails taurins espagnols… Nous aurons l’occasion de commenter cette grande affiche. Il n’en reste pas moins surprenant, inhabituel et radicalement choquant que cette annonce supposera des cartels déjà bouclés qui ne laisseront aucune chance à quelque ouverture que ce soit, à un torero d’intégrer la San Isidro après un succès et effet surprise lors des premières courses de début de saison comme c’était le cas dans le passé surtout après les Fallas, la Magdalena de Castellón et même la feria de Séville… Il faut reconnaître que ces premières ferias n’apportent pas non plus de cartels à surprises! Dont acte.

Nous aurons l’occasion, dès la semaine prochaine, de rendre compte des deux corridas et de la novillada de Valdemorillo. Nous sommes prêts. Suerte para todos!

Georges Marcillac

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