Valdemorillo 10 février 2024 – 2ème de feria – Apothéose de Juan Ortega qui s’élève au rang indiscutable de torero d’époque. Deux oreilles au 5ème de Nuñez del Cuvillo.

Il fallait vivre la première grande affiche de la saison à Valdemorillo et l’afición ne s’était point trompée car cette corrida s’annonçait à guichets fermés. Alejandro Talavante, Juan Ortega et Ginés Marín affrontaient  – si l’on peut dire – des toros de Nuñez del Cuvillo dont la reseña du sorteo du matin  était peu encourageante. Des toros de tout juste quatre ans pour, étaient sans doute choisis à l’attention d’Alejandro Talavante… (sa propre ganadería est formée, à l’origine, par des produits, mâles et femelles de Nuñez del Cuvillo). Aujourd’hui, ces toros de poids autour de 500 kg, sans les hechuras de toros faits, saul les deux derniers, semblaient être à la mesure des toreros sans le rodage de début de saison.  Seul Juan Ortega sût tirer la “substantifique moelle” du 5ème et réaliser un trasteo absolument étourdissant à la cape et surtout à la muleta, créant une oeuvre quisera difficile d’égaler, sauf par lui-même, et qui place la barre très haut pour attirer les foules, dans quelque arène qui soit, au cours de la saison qui s’ouvre. Les toros de Nuñez del Cuvillo tenaient le coup, malgré quelques mouchoirs verts qui apparaissaient au 1er pour ensuite, à divers égards, accompagner ou gêner leurs opposants toreros.

Donc, Juan Ortega était le triomphateur incontesté de cette corrida dont la faena au 5ème restera dans les mémoires. Elle devrait placer le Sévillan de Triana dans tous les cartels de renom de toutes les ferias. Son unique compétiteur actuel, dans ce registre de suprême torería, étant sans aucun doute posible, Morante de la Puebla! Sortait “Asustado” nº 54, 500 kg. né en décembre 2019, mieux cuajado que ses congénères, était reçu par des véroniques, meilleures sur la corne gauche, une demi-véronique et revolera. Il ne paraissait pas très costaud sur ses pattes malgré une course claire d’un burladero à l’autre. Une pique unique, tardo le toro, rétif le cheval, composaient un deuxième tiers peu encourageant. Le quite par chicuelinas, lentes et deux demi-véroniques annonçaient le récital qui suivait malgré le peu de charge du toro. Tardo encore durant le tercio de banderilles, le toro chargeait ensuite avec plus de vigueur. Les ayudados por alto, très toreros, une trincherilla et, en remate, une passe de la gauche, sans être vouloir être une naturelle, de rêve (de ensueño…) d’extrême lenteur et rythme. Les séries de la droite, une capeina, les naturelles allongeant la charge par les vuelos de la muleta et jeu du poignet, étaient imprimées de cette même cadence, le temple bien sûr, mais plus que cela, le temps arrêté… Le public hurlait et les olés de Las Ventas résonnaient dans La Candélaria comme jamais. L’émotion était à son comble. Jambes fléchies, Juan passait ce toro transfiguré, d’une main à l’autre, toujours de cette lenteur et caresse, naturelles ou mieux surnaturelles, sans affectation. L’estocade était portée avec décision, caídilla. Deux oreilles sans discussion et tour de piste triomphal. Juan Ortega s’était inventé un toro qui recevait les applaudissements à l’arrastre. Au 2ème, la déception gagnait le public qui avait pourtant apprécié, à la cape, un quite par delantales et une demi-véronique… escamotée. Ce toro mettait en péril Jorge Fuentes aux banderilles sur la corne droite. A la muleta, le Sévillan toréait au ralentí mais le toro semblait s’être lésé, il n’avançait plus que par à-coups sans terminer son passage dans la muleta, désintéressé et distrait, sur la fin. Les derniers muletazos, deux passes de trinchera de grande douceur, servaient à mettre en suerte le toro pour une estocade delantera.

                                                                                       

Alejandro Talavante n’était pas très bien loti pour les toros qui lui revenaient et passait par Valdemorillo sans peine ni gloire. Le premier nuñez-del-cuvillo, un novillete de 485 kg. recevait les protestations du public, quelques mouchoirs verts à la vue, perdait l’équilibre au premier capotazo par le bas. Un seule pique. Après un tercio de banderilles sans histoire venait la faena de muleta entamée par des passes suaves au toro qui se déplaçait avec difficulté. Des olés moqueurs fusaient et, en fin d’une série, le toro s’affalait. Se traînant dans les passes ultimes, il recevait une estocade desprendida d’effet immédiat. Le 4ème sortait derrengado, brochito de cornes. Il allait au picador de réserve et perdait l’équilibre des pattes avant. Javier Ambel saluait pour la pose des banderilles. Brindis au public!? Le début de faena portait le cachet d’un toreo facile et gracieux, un molinete et passe de poitrine, pieds joints. Les naturelles et derechazos successifs, muleta basse, se terminaient inévitablement par un hachazo, le toro évitant ainsi de tomber. Le handicap des pattes arrière se traduisait par des charges saccadées et, malgré tout, Talavante toréait plutôt bien sans l’impression de s’efforcer – pourquoi l’aurait-il fait? – de son air nonchalant. Quelques descabellos suivaient une estocade, facile, desprendida et arrière.

Ginés Marín n’était pas non plus favorisé par le sorteo. Le 3ème sortait avec vigueur et recevait d’entrée un mélange de véroniques et chicuelinas rapides. La pique insignifiante, sans “mettre la corde”. Ginés Marín perdait pied dans un quite par gaoneras, il reprenait la cape pour un nouveau quite de même style de gaoneras serrées. Manuel Larios se distinguait aux banderilles sans réaction du public… Dès les premiers muletazos de la droite, le toro s’agenouillait. Ensuite, il chargeait sans terminer les passes, par de légers coups de tête. Cela obligeait Ginés Marín à toréer par le haut et ainsi éviter soit l’arrêt du toro, soit sa chute. Il continuait en se mettant entre les cornes pour passer avec difficulté un animal inerte. Il en terminait par une estocade de bonne exécution, desprendida. Après la prestation de Juan Ortega, Ginés Marín se devait de montrer ses capacités et hausser le ton si son opposant le lui permettait. Il s’appliquait dans des véroniques de réception, avec temple, malgrés l’accrochage de la cape en fins de passes. Le toro, de meilleure allure que les précédents acceptait une pique, légère, pour ensuite rechigner à charger – tardo – avant un quite par chicuelinas de face et la demi-véronique du meilleur effet. Brindis au public.  A genoux, au centre du ruedo, Ginés Marín exécutait une suerte peu commune, un cambio por la espalda terminé par une arrucina!  Les derechazos de profil, compas ouvert, perdaient de leur importance, le toro ayant perdu son impulsión première. Il protestait dans des naturelles, charges descompuestas, muleta à mi-hauteur. L’arrimón final et les manoletinas n’intéressaient plus personne. Une estocade entière en terminait avec cette faena volontaire face à la médiocrité du toro.

Alejandro Talavante: silence aux deux. Juan Ortega: saluts; deux oreilles et sortie a hombros. Ginés Marín: saluts; silence. Antonio Chacón de la cuadrilla de Ginés Marín efficace à la brega, répondait à l’ovation pour la pose des banderilles au 6ème.  Javier Ambel en nfaisait de même au 4ème. Affiche de no-hay-billetes.

Georges Marcillac

Ce contenu a été publié dans Général, Georges Marcillac Escritos. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.